CHRONIQUE. Dès 50 ans, les candidats ont 50% moins de chances d’obtenir un entretien d’embauche que les plus jeunes. Lorsque ces échanges ont lieu, ils donnent pourtant de fructueux résultats, souligne notre chroniqueuse.
Philippe, 54 ans, cadre supérieur au chômage depuis trois ans, parcourt les offres d’emploi en luttant contre le découragement. Son CV bien rempli et sa motivation sincère semblent ne pas suffire pour décrocher un entretien d’embauche. De nombreux autres seniors genevois connaissent cette situation, souvent alimentée par des idées reçues.
A Genève, 36% de la population active est âgée de 50 ans et plus. Ces travailleurs sont moins licenciés que les autres classes d’âge. Pourtant, selon une étude de l’Université de Genève de 2020, dès 50 ans, les candidats ont 50% moins de chances d’obtenir un entretien que leurs homologues plus jeunes! Cette discrimination aberrante ne fait pas l’objet d’une réglementation en Suisse, alors qu’elle est interdite aux Etats-Unis depuis 1967. Si 15% des offres d’emploi en Suisse mentionnent explicitement qu’elles s’adressent aux jeunes, seulement 1% d’entre elles spécifient être destinées à un public de 45 à 65 ans.
Cette triste réalité contraste avec l’engouement observé lors d’événements de recrutement dédiés aux seniors, où les recruteurs se déclarent agréablement surpris et réellement intéressés par la qualité des profils rencontrés.
Une réelle valeur ajoutée
En étant confrontés directement au vécu professionnel et à la personnalité des candidats de 50 ans et plus, les entreprises réalisent la richesse qu’ils représentent. Ils apportent une réelle valeur ajoutée, notamment en termes de stabilité, d’encadrement et de transmission des connaissances.
La 3e édition de Job Rencontres, imaginée par la Fondation Qualife et coorganisée avec d’autres structures, aura lieu le 20 juin prochain. La plupart des entreprises présentes lors des deux premières éditions ont d’ores et déjà confirmé leur participation. Cela prouve qu’elles ont trouvé dans ce format (des entretiens de quinze minutes avec des candidats de 50 ans et plus) une formule gagnante. Le fait de rencontrer ces demandeurs d’emploi expérimentés a changé le regard qu’elles leur portaient. «J’ai découvert des personnes très motivées, à jour, «dans le coup». Je suis très agréablement surprise et ne m’attendais pas à une telle qualité de candidature en participant à cet événement», m’a confiée une recruteuse en novembre dernier.
Reponsabilité et compétitivité
Le défi de l’intégration des travailleurs de 50 ans et plus dans le monde professionnel à Genève est loin d’être insurmontable. En reconnaissant et valorisant leur apport, les entreprises pourront non seulement contribuer à leur responsabilité sociale, mais aussi renforcer leur compétitivité à long terme. Pour cela, il faut donner la chance à ces candidats de se présenter en entretien. Ensuite, chacun joue ses cartes et l’entreprise choisit en connaissance de cause son candidat favori. Philippe et tous les autres seniors genevois méritent cette chance.