CHRONIQUE. Les stéréotypes qui freinent l’embauche des 50 ans et plus demeurent. Pourtant, les arguments favorables à l’engagement des «seniors» sont bien supérieurs aux arguments en sa défaveur, détaille notre chroniqueuse
Romain Rolland a écrit: «Il fait bon vieillir.» C’est l’impression que me donnent les cinquantenaires. J’envie le savoir qu’ils ont acquis et leur capacité à faire la part des choses. Dans ma course effrénée à vouloir cocher toutes les cases (de la super-professionnelle, de la parfaite maman, de la femme épanouie et de la citoyenne investie), je cherche parfois la pédale de frein que les «seniors» semblent si bien maîtriser: une vie bien remplie, mais à un rythme qui n’est pas subi et avec une énergie qui est réservée aux choses qui ont du sens.
Je porte une affection particulière à celles et ceux qui ont acquis pendant plus d’un demi-siècle des connaissances et dont l’expérience rassure les plus jeunes qui en sont encore dépourvu. En cas de tempête, les plus de 50 ans sauront tenir le cap. Ils sont suffisamment matures pour savoir quelles décisions prendre, suffisamment jeunes pour pouvoir les porter.
Mais alors comment expliquer qu’une chevelure grisonnante rassure dans la vie, mais inquiète dans le monde du travail? C’est une question de préjugés.
Des coûts à relativiser
Chers, lents, peu adaptables, fragiles dans leur santé, maladroits avec les outils numériques… les a priori vont bon train. Or, ils s’appuient sur une fausse représentation et un mauvais calcul: la différence de LPP à la charge de l’employeur entre l’embauche d’une personne de 45 ans et une personne de 58 ans pour un salaire annuel de 90 000 francs est de 1350 francs, soit à peine plus de 100 francs par mois. Est-ce si cher payé pour treize années supplémentaires d’expérience et donc de compétences?! Quant aux absences, avec moins de grossesses et d’enfants malades à garder, les plus de 50 ans se montrent au contraire fidèles au poste.
Si on se veut rationnel, les arguments favorables à l’engagement des «seniors» sont bien supérieurs aux arguments en sa défaveur, que ce soit à l’aune de la richesse des connaissances, de la solidité des soft skills ou de la fiabilité.
Ainsi, tout le monde devrait se questionner sur ses propres préjugés qui amènent à prendre les mauvaises décisions. Lutter contre ces derniers est le devoir de chacun·e. Celui des recruteurs bien sûr, mais également celui de celles et ceux qui en sont victimes. Dans mon métier, je constate qu’à force d’entendre qu’ils sont «trop vieux» les plus de 50 ans tendent à se considérer comme tels. Ces croyances limitantes les accompagnent dans leur recherche d’emploi et cela finit par se ressentir dans leur attitude et leur discours.
L’importance de la formation continue
Pour tordre le cou à ces préjugés, les 50+ doivent porter un soin particulier à leur employabilité. Les formations continues sont, par exemple, essentielles: il n’est jamais trop tard pour se former, il faut oser se lancer. C’est la garantie de tenir à jour ses compétences et de pouvoir en attester. Ils doivent également garder en tête qu’il n’y a pas d’âge pour se faire aider. Des structures comme la Fondation Qualife les accompagnent dans leur recherche d’emploi, sensibilisent les entreprises à cette question et font office de facilitateurs dans la rencontre entre ces deux publics. Il faut oser faire appel aux soutiens existants.
La persistance de ces préjugés n’est donc pas une fatalité. C’est l’affaire de tous et toutes d’en prendre conscience et de se laisser surprendre par ces cinquantenaires et soixantenaires qui représentent le tiers de notre population active ainsi qu’une vraie richesse pour notre économie.